Lettre à Camille Rambaud, juin 1859

  • il y a 3 ans
Lettre n°23 (22) [8]
J.M.J. Cité, fin juin 1859
Mon Frère,
(…)
Je dis donc que l’œuvre de la première communion et des persévérants ne peut marcher ensemble avec l’œuvre de la cité et qu’elles sont un obstacle l’une à l’autre, la cité est un obstacle à l’œuvre de nos enfants ; la grande raison, c’est que vos frères (les bénévoles agissant en lien avec Rambaud) ne peuvent pas faire deux choses à la fois, ils ne peuvent pas répondre aux habitants de la Cité recevoir les loyers, faire la quête et instruire les enfants. Comment voulez-vous aller faire le catéchisme quand vous avez la tête remplie d’ennuis, d’inquiétudes et d’affaires. Je vois bien ce que le Frère Paul a fait dans cette dernière série. Comment inspirer la foi, la piété quand continuellement on est obligé de vivre dans la dissipation d’une vie tout extérieure ; vous me direz tout ce que vous voudrez, il faut que les frères qui sont chargés de l’instruction des enfants ne soient employés qu’à cela, qu’ils ne s’occupent que de cela, qu’ils ne pensent qu’à cela, toute autre occupation est incompatible ; vous ne voyez pas les frères de la doctrine chrétienne faire autre chose que de s’occuper de leurs enfants ; il faut que vos frères les suivent à l’église quand ils y sont, qu’ils les suivent au travail pour leur donner l’amour du travail et leur parler de la vertu en toute circonstance, à tout propos et à chaque instant, pour les reprendre avec douceur et amour quand ils tombent dans quelque faute ; comment voulez-vous qu’un Ménétrier, un Benoît et autres leur inspirent l’amour du travail, quand, pendant tout le temps de l’exercice manuel, les enfants voient jouer, lire, s’amuser à autre chose qu’à faire ce qu’ils doivent faire ; la vertu ne vient pas de cette façon-là, non, il faut qu’il y ait des frères qui aiment ces enfants, qui comprennent ces enfants et aient pour eux de l’affection et du dévouement; si un enfant a soif ou faim, qu’il aille demander un morceau de pain à la cuisine, on lui répond par un pot d’eau sur la figure, on le traite de bête, on le regarde avec mépris ou on ne fait pas attention à lui, comment voulez-vous que ces enfants aiment la maison et y reviennent ensuite avec plaisir. Et cela sera ainsi tant que vous n’aurez que des enfants pour diriger d’autres enfants. Si au moins ils avaient compris un peu le dévouement, mais cet esprit est si difficile à acquérir et à donner. Ce sont donc des frères, des frères connaissant l’œuvre, appréciant l’œuvre, qui doivent guider, instruire les enfants, les suivre partout, et il ne faut pas que ces frères aient autre chose à faire que de soigner nos chers enfants. J’ai vu souvent tous mes efforts paralysés en un instant par tout ce que je viens de vous dire, alors, si un fait et l’autre défait, comment pourrons-nous avancer ! Obstacle dans les habitants de la Cité 

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